Ello : Une opportunité publicitaire… différente?

« Dites hello à Ello ! »

Les jeux de mot de ce genre abondent dans les actualités web ces jours-ci. Ello, le nouveau réseau social sur invitation, a piqué la curiosité de plusieurs dizaines de milliers de personnes dans les dernières semaines. Dans un court manifeste, le nouveau réseau social vous met en garde contre « votre » réseau social et promet de ne pas vous traiter comme un produit. Sa position est clairement énoncée par son créateur, Paul Budnitz, dans cet article du journal Le Monde.

« La publicité, c’est le Diable. »

Les sceptiques sont nombreux. Est-ce que cette nouvelle tendance est attribuable au scandale des drag queens sur Facebook ? Comment le réseau social pourra-t-il survivre sans publicités ? Les utilisateurs voudront-ils payer  pour les fonctionnalités du site ? Pourquoi le code source n’est pas public et le financement issu de capital de risque ? L’intention est-elle capitaliste avant tout ? Les données des utilisateurs sont-elles vraiment privées ? Nous n’avons pas de réponses à ces questions. Le futur nous le dira. Par contre, le caractère exclusif de Ello pourrait bel et bien constituer une opportunité publicitaire pour les entreprises…

Les influenceurs

« Merci de votre intérêt pour Ello. Nous vous inviterons le plus rapidement possible… »

C’est le message que vous recevrez si vous essayez de vous « inscrire » sur Ello. En raison de l’engouement actuel pour la plateforme, un membre du réseau social doit vous inviter pour que vous puissiez y avoir accès immédiatement. Ello est donc tendance, nouveau et exclusif. Les jeunes influenceurs, prédisposés à influencer les membres d’un groupe social plus que la moyenne des gens, risquent de s’y retrouver. Ces individus ont une valeur pour les entreprises et peuvent servir de supports publicitaires sur le Web. Certes, cette forme de publicité est moins directe qu’une publication sponsorisée dans votre fil d’actualité Facebook, mais au bout du compte, il y a tout de même un produit et des consommateurs potentiels.

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Et si votre nouvel « ami » Ello était photographié avec des accessoires de mode dernier cri. Et s’il postait des photos avec un appareil photo de qualité supérieure ? Serais-ce de la publicité ? Pas vraiment, car vous pourriez faire de même. Et si ces produits lui étaient fournis gratuitement par des entreprises ? C’est ce qu’on appelle du marketing de bouche-à-oreille, soit l’influence intentionnelle de la communication entre les consommateurs en utilisant des techniques de marketing professionnelles (Kozinets et al., 2010). Pour des raisons éthiques, les entreprises ne peuvent pas rémunérer un influenceur pour parler positivement d’une marque. Or, elles sont libres de leur offrir n’importe quel produit pour qu’ils en fassent une « évaluation ». C’est souvent le cas pour les blogueurs qui ont un auditoire important.

Cibler les influenceurs et viser les consommateurs

Les informations des utilisateurs de Ello sont protégées, mais en choisissant un influenceur, il est facile de les cibler. Par exemple, un jeune hipster reconnu pour ses connaissances musicales semble un bon choix afin de promouvoir une salle de spectacle pour les artistes émergents. L’objectif de cet article n’est pas de remettre en doute les intentions de Ello ou la véracité de sa mission, mais plutôt de souligner le potentiel de cette plateforme pour un type de marketing non-traditionnel. Est-ce que les influenceurs sur les réseaux sociaux « sur invitation » seront utilisés dans une optique commerciale, malgré leur position anti-publicité ? Il s’agit d’une contradiction fascinante à suivre sur le Web qui soulève plusieurs questions, notamment au niveau de l’éthique et de la transparence.

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Source: Kozinets, R. V., de Valck, K., Wojnicki, Andrea C. et S. J.S. Wilner (2010). «Networked Narratives : Understanding Word-of-Mouth Marketing in Online Communities», Journal of Marketing, vol. 74, no 2, p. 71-89.